Les 3 ballons 2007 : une balade de 205 km

Publié le par Nicolas

Les 3 ballons. Le 09 Juin 2007.

210 kilomètres, 4300 mètres de dénivelé.

Première expérience de longue distance de ce type.

La veille, avant de partir, je réalise l'énormité de la tâche à accomplir. J'éprouve une certaine crainte, pour ne pas dire une crainte certaine : si je suis cuit (comme on peut être cuit en vélo) au km 150, ça risque d'être atroce.

Une cyclo, si longue, si "costaud", ça n'est pas pour tout le monde.....

Départ du camping de Champagney.

En réalité, le camping n'existe plus. Tout cassé. Et pas encore prêt pour la saison estivale qui s'annonce. Nous décidons de faire du camping sauvage. Petit promontoire sympathique avec vue sur lac.

7h15 du matin sur la ligne de départ, dans le village tout proche. Le temps est bruineux : on ne voit pas les montagnes avoisinantes. Nous attendons dans le calme. Il y a beaucoup de monde.  Personne ne nous prévient du léger retard de course (nous ne partirons qu'à 7h35). En réalité, il y a tellement de monde et nous sommes tellement loin de la vraie ligne de départ que nous ne pouvions même pas entendre le speaker de la course.

Enfin, le départ est lancé. Ca roule et ça marche. Je décide derechef de ne pas faire le fanfaron et de mettre la pédale douce (heureuse expression). Je ne veux pas me mettre dans le rouge comme dans les autres courses. Car, ici, sur cette longue distance, c'est clair, ça sera l'abandon en cas de panne physique et autre hypoglycémie. Je prends d'entrée de jeu la roue de Michel, lequel, avec une grande expérience des compétitions, se glisse dans les roulettes des autres cyclistes, sans efforts et à une vitesse très respectacle. Du travail d'orfèvre. Je regarde et j'apprends. Je comprends l'expression :"être au chaud" dans un peloton. C'est vraiment le cas. Une douce sensation de chaleur me pénètre (n'ayons pas peur des mots).

1er kilomètre. Je perds un de mes deux bidons d'eau. Passage d'une ligne à niveau un peu trop cahotique. Ca commence bien ! Je décide de ne pas m'arrêter, d'une part parce que je ne peux pas : j'évolue caché au milieu d'un groupe, et d'autre part, parce que je n'ai pas envie de faire des efforts pour revenir seul sur les pelotons.

Nous entamons l'ascension du Ballon de Servance par une petite route forèstière assez étroite : ça grouille de cyclistes. Je quitte d'emblée Michel. Tant pis. Je ne ferai pas la cyclo avec lui. Je décide de rouler au train à une allure sereine mais pas en touriste. C'est une course tout de même ! Je suis constamment sur la gauche de la route en train de doubler. Je constate que de nombreux cyclistes crèvent dans les premiers kilomètres. Quelle poisse ! D'autres s'arrêtent pour faire pipi. Y pouvaient pas prévoir ?

Sommet du ballon de Servance : 1200 m.

La descente est rugueuse et mon vélo en alu encaisse difficilement les ondulations du bitume. En fait, c'est mon corps qui fait amortisseur. Je double également beaucoup de monde. Les gens sont assez effrayés par le revêtement. Des adeptes de la techniques dite de la femme enceinte : la peur au ventre. Nous, bas-rhinois, avons l'habitude de descendre ce type de "piste", car c'est assez classique par chez nous...

Au Thillot, la route devient un faux-plat montant pour atteindre le Col du Ménil. Je saute un peloton qui ne roule pas assez à mon goût, d'autant que j'en aperçois un autre, 500 mètres devant moi. Le col se passe au grand plateau. Tout va bien. Je ne force pas.

Ensuite, montée sur le col d'Oderen (864 m). Je me retrouve dans un groupe de 4 et nous avalons beaucoup de monde. On roule assez vite, en tâchant toujours de ne pas être au-dessus de la vitesse seuil. On monte à ~20 km/h.

Un stand boisson au sommet.  Je m'arrête. J'ai décidé de me faire tous les stands. A chaque sommet. Ca me prend du temps (au total, un cumul de 30 minutes), mais au moins, j'ai l'esprit plus cool, je papote avec d'autres coureurs, je plaisante, et je me repose physiquement. Je suis partisan des changements de rythme.

Descente rapide. On arrive à Kruth. On remonte le col du Bramont. Pas mal de coureurs sur les premiers kilomètres. Enormément d'hollandais. Ils sont venus en nombre à l'approche de la plus grande cyclo montagnarde d'Europe : la Marmotte en Juillet avec ses 5 000 mètres de dénivelé. Je me demande où ils peuvent bien s'entraîner dans leur plat pays. Et pourtant, ça roule plutôt bien.

Arrivé au col, on descend un petit kilomètre pour remonter aussitôt, par la route des Américains sur la route des crètes, direction le Markstein puis le Grand Ballon. Une grosse pluie nous attend là-haut. Sympa ! Et un orage par dessus le marché. J'avoue que la présence de grands pics métalliques au bord de la route ne m'inspire pas confiance. Un hollandais décide de passer la surmultipliée avec un vélo en Scandium. Je ne peux pas prendre de relais. Il roule fort, le bougre. Je suce sa roue et suis bien content de me faire emmener sur le Grand Ballon (1424 m).

Arrêt. Les sandwichs au camembert me font le plus grand bien. Manger salé est plus flatteur pour le palais, car le sucre que l'on ingurgite régulièrement a la fâcheuse vertu de saturer l'organisme. A un moment, il ne veut plus et refuse d'ingérer les glucides.

La descente est froide. Il pleut encore plus. Nous dévalons les pentes dans des torrents de pluie. Nous ne faisons plus qu'un avec l'élément liquide. C'est périlleux et plutôt démoralisant. Ca va s'arrêter quand ? A Willer sur Thur, mes lunettes de soleil (qui ne servent à rien) tombent. Je lâche compagnie au groupe dans lequel j'étais. Je reviendrai sur eux à la fin du village. Un col difficile nous attend : le col du Hundsrück. Pas très haut (748 m), mais des pentes pénibles. Du calme ! Il reste encore deux cols sérieux après celui-là ! Le Ballon d'Alsace, et le juge de paix de la course : la Planche des Belles Filles. Belle descente. Je prends des risques dans les épingles. Personne ne suit. Quelle bande de femmelettes ! Au bas du Ballon d'Alsace, ravito. Il est 13h15. Où j'apprends que les premiers de la course sont passés au même endroit sous les coups de midi. Sans dire bonjour ni s'arrêter. Malpolis !

La montée est dure.

Le bruit de ma roue arrière devient une offense pour toutes les oreilles environnantes. Ca craque à chaque tour de roue. Les roulements à billes sont détruits. Les vélos tout carbone que je double (j'en double de moins en moins à vrai dire) sont verts.

Je prends mon temps et devise avec un nordiste exilé en Auvergne. Les Ch'timis se reconnaissent facilement. Contact facile, sourires, blagues, et simplicité.  Le type travaille sur Clermont depuis 17 ans. Pas un seul ami du cru. Auvergnats, Alsaciens, même combat ! Contact froid et qui ne va pas de soi.

La descente terminée, le lac de Malsaucy avec sa partie vallonée sur plusieurs dizaines de kilomètres. Soudain, une moto de la course se met à ouvrir la route au peloton dans lequel j'évolue. Chacun y met de son relais. A mon tour, je me mets en position contre la montre et fait plusieurs kilomètres devant en étirant le peloton. Y'a pas à dire, la présence de la moto nous grise ! Dès que la route s'élève un peu, le peloton (une trentaine d'éléments)  se resserre. Puis, un peu n'importe comment, les attaques commencent à fuser, puis, tout à coup, on s'arrête de rouler. C'est un peu n'importe quoi. On dirait une course régionale. Et puis soudain, l'état de grâce. On m'avait dit que ça existait, mais là, ça y est, j'y suis. A l'occasion d'une montée plus raide, je lâche un à un les plus forts du groupe. Je n'ai pas l'impression de faire d'efforts supplémentaires. Je dépasse le motard et fonds sur un autre groupe situé plus avant. Je les lâche également. Je rattrape un troisième groupe. Idem. Quelle sensation !

Je repasse par le village de départ et m'attaque à la dernière difficulté du jour : la Planche. Quel morceau ! 5 kilomètres à 11% de moyenne ! C'est très très dur. Beaucoup de coureurs mettent pied(s) à terre. 200 kilomètres dans les jambes pour finir avec une arrivée en altitude difficilissime. Je serre les dents, mais je sens que j'y arriverai. C'est hard et je ne regarde pas les échoués. C'est comme le baillement : c'est contagieux. Ne surtout pas s'écouter. Du courage et encore du courage !

Enfin, je passe la ligne d'arrivée. 25 km/h sans les pauses. Je suis surpris de ma relative fraîcheur. 8h15 de vélo.

Je prends le casse-croûte offert par l'organisation, bois  et attends mon diplôme. Michel arrive une demi-heure après moi. Il a bien tourné également.

Il nous faut ensuite retourner à la voiture. Encore environ 15 kilomètres. En descendant la Planche, ma pompe tombe. Michel me dit qu'il a vu des quantités astronomiques de bidons, pompes, lunettes de soleil, vêtements de pluie rangés négligemment dans les poches arrières et tombés, jonchant ainsi les routes empruntées. Y a du fric à se faire rien qu'en ramassant tous ces objets.....

Je pète la forme et ramène Michel. J'aurais pu en faire encore 50. Je suis très content de cette course. Je n'y ai pris que du plaisir. Et puis, ça y est. Je suis devenu un vrai cycliste.

Mais une chose est sûre : il faut que je m'achète un nouveau vélo !!!!!!!

Publié dans Vélo de route

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